Nous retrouvons MURER Eugène à trente-cinq ans, commerçant boulevard Voltaire. Il a fait ce qu'il a décidé de faire...
Généralités Les œuvres de Vincent VAN GOGH
Eugène MURER - (1846-1906) - le peintre.
Eugène MURER - 2 Tableaux Biographie Tombe de Eugène MURER
Catalogue exposition Eugène MURER Dessin & Aquarelle Les Signatures
Tombe de Eugène MURER au cimetière d'Auvers-sur-Oise
Eugène MURER - le peintre.
Nous retrouvons Eugène Murer à trente-cinq ans, commerçant boulevard Voltaire. Il a fait ce qu'il a décidé de faire. Ce n'est pas qu'il soit riche, mais il est suffisamment à l'aise pour rattacher les beaux fils de la Vierge qu'il a volontairement brisés, reprendre les rêves d'antan. --- Son esprit est toujours alerte ; son imagination est restée vive et follement éprise de toutes les poésies. Pourtant Murer a passé de rudes instants durant les dix années qui viennent de s'écouler. Etabli pendant la guerre de 70 et la Commune, il traverse cette sombre époque cahoté par les plus dramatiques événements. Sans le vouloir, il voit fusiller les otages à la Roquette. Fusiller aussi le petit comte de Beaufort, un traîte, dit-on. Du seuil de sa porte il regarde revenir du combat le comédien colonel Lisbonne, qui, la jambe cassée par une balle versaillaise, se fait emporter dans une voiture à bras trainée par des fédérés sanglants et noirs de poudre. Il assiste en spectateur au bris du couteau de la guillotine qui exécuta Orsini le régicide. Et c'est chez lui que Delescluse fait son dernier repas avant d'aller tranquillement se faire tuer à la barricade du Château-d-eau. Il passe la semaine sanglante pris entre deux barricade, dans le sifflement des balles et l'éclat des obus qui trouent les façades et brisent les arbres du boulevard. Tous les locataires de la maison qu'il habite on fui, terrifiés par les bombes qui, de Montmartre et du Père Lachaise, tombent dans la cour de l'immeuble, où se trouve, couché sur une civière, le cadavre du colonel Henri abandonné là par des fédérés, ses soldats. Murer est resté seul avec sa jeune femme et le concierge, lequel devenu subitement fou, veut tuer ses deux derniers locataires. --- On ne s'amusait pas follement en cette terrible semaine ; mais on riait quand même à l'occasion. --- Un jour, un fédéré barbouillé de poudre, entre en coup de vent dans la boutique dont la porte est restée entrebaillé. Il explique que les troupes de Versailles sont maîtresse du quartier. Toutes les rues sont cernées. Impossible de se sauver. Si on le renvoie, il serra pris et fusillé immédiatement. C'est l'ordre de Galiffet. Murer n'hésite pas. Il prend les vêtements militaires de l'insurgé, les jette dans le four qui flambe, puis il l'affube d'une veste blanche, d'une toque, l'enveloppe d'un tablier bleue, le pousse dans le fournil et l'occupe à tamiser de la farine. Au même instant arrive un sergent et quatre mobiles bretons. On leur a signalé l'entrée du fédéré dans la maison ; ils le réclament brutalement, avec des menaces de mort. Murer, très calme, les aide avec conscience à chercher partout. Naturellement le sergent ne trouve rien, malgré que dans sa perquisition minitieuse il coudoie à chaque instant le fugitif... Il part furieux, et quand la porte est bien fermée sur son dos, les trois complices éclatent de rire. Franchement cela valait bien ça!
Enfin le calme est rétabli dans Paris. Une ère de prospérité suit cette époque d'agitation sanglante ; Eugène Murer en profite pour travailler ferme à l'édification de la petite fortune nécessaire à son indépendance. Un dernier malheur le frappe en route. Il perd sa femme. Le voilà donc encore seul à lutter. Mais non, sa soeur, une forte et brave fille, est venue se placer auprès de lui. C'est elle, maintenant, qui dirige la maison de commerce, l'embellit de sa grâce, l'éclaire de sa beauté, l'égave de son rire facile. Aidé de ce bon compagnon qui garde pour lui seul tout le labeur matéril, Murer reprend ses travaux littéraires. Successivement paraissent le Fou --- petit poème rimé ; Sous les roses, La peine de mort. Ce dernier roman vaut à l'auteur une lettre flatteuse d'Emile de Girardin l'invitant à le venir voir. L'écrivain se rend à la demande avec, en poche, le manuscrit de Pauline Lavinia. Il trouve le célébre polémiste dans sa fameuse bibliothèque, en train de dépouiller la centaine de journaux qu'il lisait chaque jour. Girardin renouvelle ses compliments, accepte le roman de Pauline pour son journal d'alors --- La France --- cause un peu, puis, très affable, reconduit l'auteur. Quelque temps après, Girardin meurt. Dans la bousculade qu'entraina l'inventaire de l'héritage, le manuscrit de Lavinia fut perdu ; c'est deux ans après seulement qu'on le retrouva chez le notaire des héritiers. Cet incident retarda l'apparition du volume à son heure ; mais entre temps, Murer publie la Mère nom de Dieu, le plus libre d'allure et le meilleur ouvrage du romancier poète. Bientôt l'écrivain entre à la Correspondance française, sous la direction de Léon Delbois. La critique d'art lui est confiée. C'est l'époque des premières expositions impressionnistes. De suite Murer se passionne pour cette école claire, que ses instincts d'artiste très lucide lui signale comme la vraie. Seul contre Paris entier qui s'esclaffe devant les toiles des nouveaux venus, il attaque ferme l'aveugle sottise des détracteurs, et défend à grands coups de plume acérée ses vibrantes opinions. Le courage de cette poignée de peintres qui, tous pauvres, sans amateurs, sans marchands, sans soutiens d'aucune sorte, osent carrément s'en prendre à l'école adulée, officielle et bitumeuse le transporte, et fonde un dîner de combat qui se tient les mercredis soirs, chez lui, boulevard Voltaire.
C'est là que pendant dix ans que dure la bataille avant le triomphe final, viennent tour à tour discuter et rire : Guérard et Chiencailloux les graves, Gachet le docteur fantasque, Cabaner l'ironiste musicien, Gru le félé, qui publia les Morts violantes, Tanguy l'utopiste féroce, le regretté Norbert Goëneutte, Hochedé le philosophe, et toute la belle pléiade des impressionnisres : Renoir, Monet, Pissarro, Sysley, Cézanne, Guillaumin et Vignon. Ces franches agapes, où flambèrent tant de discussions retentissantes sur la nouvelle technique, étaient présidées par la soeur du patron, toujours aimable et souriante, et par son amie, l'élégante Geneviève C..., qui venait égréner là les perles d'un esprit plein de finesse et de prime-saut. --- Puis, quand Paris railleur fut enfin conquis par d'incontestables talents qui s'affirmaient de plus en plus fermes et vigoureux ; quand le succès fut définitif, chacun s'en alla de son côté. Murer se blottit à Auvers.
C'est dans ce nid d'artiste que, changeant son fusil d'épaule, comme le dit Paul Alexis en une amusante préface, il passa du dillettantisme à l'action, revint à ses premières amours pour la peinture. Très doué, se possédant parfaitement, libre, bien préparé par une longue et sagace observation du talent de ses amis, dont il avait soigneusement suivi les brillantes évolutions, il commença ses premiers pastels. Tout de suite l'artiste se montra chaud coloriste et bon visionnaire. Très travailleur, très tenace, extrêmement actif, Murer fit de rapides progrès, marcha par enjambée de géant dans cette voie nouvelle. Renoir, son ami, dont il adorait le talent délicieux, l'engagea fortement à voyager afin de travailler beaucoup seul, loin des dangereuses influences. Le conseil était bon et d'un vrai camarade : Murer ne se le fit pas répéter. Il partit en Afrique au pays du soleil, y resta deux ans, puis un matin on le vit revenir avec une véritable cargaison de tableaux : trois cents toiles environ. Toutes n'étaient pas réussies, mais un grand nombre étonnèrent par leur naïveté chamante. Dans une première exposition qui se fit à la Bodinière, en décembre 1895, sous l'intelligente direction de Lassale, Murer parut ce qu'il est bien réellement : coloriste brillant, très fin, très délicat en ses visions d'art. Passionnément discuté, ardemment défendu, son talent, bien personnel, procéde à la fois des impressionnistes par l'exécution synthétique, et des primitifs par le sentiment naPif et distingué qui se dégage de ses œuvres. C'est parmi ces derniers que je classerais Murer s'il n'était oiseux d'assigner une place définitive à l'artiste véritable, tourmenté comme lui par l'incessant désir de se perfectionner, en cherchant à s'élever aux pures régions où flotte l'idéal absolu. Pour l'instant, c'est un primitif. Le restera-t-il? L'affirmer serait téméraire. Avec cet esprit amoureux de trouvailles, ce travailleur obstiné, il faut toujours s'attendre à quelque évolution nouvelle et surprenante.
Regardons et attendons.
Jérôme DOUCET.
(Eugène MURER vers 1901)
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MURER Eugène - (1846 - 1906)
Extrait de: Les hommes d'Aujourd'hui - Librairie Léon Vanier - 9e volume.
N°433 Spécial Eugène MURER - texte de: Jérôme DOUCET.
(téléchargement d'une vidéo sur AUVERS SUR OISE)
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