Correspondance, les lettres de Ludovic PIETTE à son ami Camille PISSARRO, 1863-1877 : quatorze ans pour une correspondance familière entre deux amis,
Généralités Les œuvres de Vincent VAN GOGH
[8 mai 1864], lettre de Piette adressée à Pissarro,
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Musée Pissarro de Pontoise Musée TAVET-DELACOUR
Lettre de Ludovic PIETTE à son ami Camille PISSARRO du "8 mai 1864".
[8 mai 1864]
Mon cher Pissarro,
Je marche de surprise en surprise. D'abord vous ne venez plus, puis enfin une bonne nouvelle, vous venez encore quelques jours et j'espérais que nous les aurions bien employés, puis tout à coup, vous ne venez plus. Tâchons, cher ami, de mettre un peu d'ordre dans tout cela. De mon côté, j'ai devant moi une quinzaine, pas moins (je n'ai plus de nouvelle de mon frère, est-il en route ou arrêté [Autant qu'on peut en juger à travers les rares allusions de Piette sur son frère (Félix ? qui a habité Montfoucault jusqu'en 1856), celui-ci s'était engagé parmi les volontaires garibaldiens faisant campagne, sous la conduite de l'immigré L. Mieroslawski, avec les insurgés polonais ; une nouvelle fois, à Varsovie en 1863, ceux-ci avaient tenté d'ébranler la domination russe.], qu'il vienne me chercher ou que j'aille le retrouver c'est une quinzaine). J'ai donc une quinzaine à vous donner : pouvez-vous vous arracher une quinzaine ? Si la maladie de monsieur votre père n'empire pas, ou se calme, vous pourriez faire cette petite escapade [La longue maladie de Frédéric Pissarro (1802-1865) n'était pas sans apporter des responsabilités supplémentaires à son fils. Elle était sans doute la principale raison qui empêchait Camille de s'éloigner de ses parents installés alors Chaussée de la Muette à Passy ; son frère Alfred vivait la plupart du temps à Saint- Thomas (Antilles danoises à l'époque) où il dirigeait l'affaire familiale. Pourtant, avant la fin de l'année, Pissarro se décidera à faire avec sa femme et son fils cette « escapade » puisque plusieurs œuvres de Montfoucault sont datées de 1864.]. Admettons que vous puissiez le faire : une quinzaine de jours de travail, c'est énorme, surtout si nous travaillons avec la rage du désespoir.
Vous ne pouvez vous figurer comment tout est changé, comme la nature a des verts variés et tendres : tout est resplendissant, en ces quelques jours qui nous séparent des jours derniers. Vous pouvez faire un chef d’œuvre soigné et d'autres études bien précieuses pour la couleur et la tendresse. Maintenant, c'en serait assez avec ce que vous avez pour aller faire des tableaux, dans votre séjour forcé à Paris, en attendant le rétablissement de monsieur votre père.
Je vous donne sérieusement ce conseil, parce que ce serait une lacune pour vous si vous ne faites rien du printemps vert. Venez donc, je sais que cela fait des frais, et que vous avez à craindre d'être rappelé encore après avoir commencé à travailler, que voulez-vous, risquez encore. Vers le 20 vous toucherez votre pension et vous pourrez vous remettre en route [Pissarro bénéficiait d'une pension versée par sa famille. D'abord de quatre cents francs, elle sera progressivement réduite.]. Pour éviter de vous renvoyer l'argent que vous me faites parvenir, vu que je n'irai pas à Lassay, vous iriez rue Constantine 44, chez M. Drouelle, le prier de vous remettre de ma part trente francs, cela m'éviterait d'aller à Lassay, puis à vous, de me renvoyer encore cet argent si vous ne pouviez décidément pas venir. A revoir, et à bientôt j'espère, et le temps passe vite. Arrivez-nous sans vous annoncer. Tout le monde se porte bien dans la maison.
Au revoir donc, à vous,
Je joins une liste de couleurs pour Henri Deforges [Deforges, successeur de Carpentier, était fabricant de couleurs et de toiles à peindre ; ses ateliers étaient situés rue Legendre - rue qui coupe l'avenue de Clichy.].
Si vous veniez vous auriez la bonté de m'apporter cela, ainsi qu'un couteau à palette que vous prendrez aussi chez lui.
Si vous ne venez pas, conservez quelque temps la liste et je vous dirai pourquoi.
Peut-on se procurer des tubes vides ? Vous en êtes-vous informé ? Ce sera précieux pour les grandes études.
Si vous trouviez le moyen d'avoir un rouleau de papier goudron, trois ou quatre mètres, c'est bon pour peindre une étude de détail pour laquelle on ne veut pas user une bonne toile ; seulement si cela vous retarde, comme nous sommes pressés, j'attendrai un autre moment, l'essentiel étant d'arriver vite.
Deforges n'ayant jamais beaucoup de couleurs prêtes à la fois, il me donnerait ce qu'il aurait de suite - ne pas attendre - cela vous retarderait. J'ai encore un peu de couleurs.
Vous pourriez mettre un peu de vernis dans une poche, je rajoute cela à la liste :
Prière à Monsieur Drouelle de remettre vingt francs à Monsieur Pissarro pour quelques achats qu'il a à faire pour moi ; je saisis l'occasion de lui serrer la main.
Son tout dévoué,
Piette
Il y a chez Deforges un maître ouvrier qu'on appelle Richard.
Il est toujours à l'atelier rue (boulevard) de Clichy ; si vous aviez occasion de le voir et que vous lui demandiez cela de ma part (où se vendent les tubes), il vous le dirait sans aucun doute ; vous lui diriez que vous m'attendez à Paris. Voici pourquoi : il serait vexé que je ne sois pas allé le voir, parce qu'il me rend beaucoup de services et j'avais remis cela pour mon voyage à l'exposition.
Ce dit voyage restant, Richard reste aussi, et je ne veux pas le vexer, vous pouvez le dire (que je vous charge de lui donner le bonjour, mais toujours ne passez pas le temps à cela si vous n'en avez pas à perdre).
A vous.
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Extrait du Livre " Mon cher Pissarro - Lettres de Ludovic Piette à Camille Pissarro"
" Editions du Valhermeil "
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source de cette lettre: inlibroveritas.net pages 19 - 20 - 21 - 22
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Lettre de Ludovic PIETTE à son grand ami Camille PISSARRO.
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