Généralités Les œuvres de Vincent VAN GOGH
La maladie mentale de Vincent Van Gogh:
La maladie mentale de Vincent Van Gogh - page 2-3-4
Tout connaître sur la maladie mentale de Vincent Van Gogh, savoir de quoi souffrait Vincent Van Gogh.
En 1889, cet asile Saint-Paul était dirigé par le docteur Peyron. Vincent Van Gogh le décrit comme « un petit homme goutteux, veuf depuis quelques années, et qui portait des lunettes très noires ».
En réalité, l’asile se dirigeait lui-même. Dans ce temps-là, sous le bénéfice de cette honteuse loi de 1833, et qui n’est pas encore tout à fait abrogée, à la honte des Chambres successives, --- et c’est d’autant plus bête que la plupart des députés et des ministres finissent dans la gâtisme ! --- on ne redoutait aucune visite inquisitoriale… L’asile se dirigeant donc lui-même, le docteur Peyron était une sorte de médecin paternel, de bons sentiments, mais à qui les maladies nerveuses et mentales, sous toutes leurs formes, se révélaient absolument mystérieuses.
Il se contentait de visiter ses pensionnaires, comme on essayerait de parler avec des habitants de la Lune. Un économe s’occupait de la cuisine, du payement des pensions, ect. ; et, si l’on s’en rapporte aux lettres de Vincent envoyées de Saint-Rémy, l’asile était une vaste pension de famille où l’on mangeait mal et où on laissait les malades dans la plus complète oisiveté.
Aussi bien, les médecins aliénistes actuels sont-ils entrés décisivement dans le complexe labyrinthe des maladies du cerveau ? Il n’est peut-être pas aisé de répondre. Le docteur Peyron attendait du ciel toutes les guérisons ; et ainsi il se montrait sage.
Vincent Van Gogh, placé à Saint-Paul, le docteur Peyron ne compta donc avec lui qu’un malade de plus. Une nourriture à des heures fixes, une surveillance véritable par les gardiens et les gardiens-chefs ; des bains et des douches. Le programme était rempli.
A vivre avec les déments, Vincent Van Gogh s’habitua à leurs gestes, à leurs cris ; et, tout d’abord, son horreur de la folie s’adoucit. Il continua d’écrire à son frère ; il parla de ses nouveaux tableaux peints dans le parc, et de ceux qu’il entreprendrait bientôt au dehors… Il n’attend plus pour cela que la bonne autorisation de sortir ; et il parle très simplement de ses camarades d’asiles :
« Ces malheureux ne faisait absolument rien (pas un livre, rien pour les distraire qu’un jeu de boules et un jeu de dames) n’ont, dit-il, d’autre distraction journalière que de se bourrer de pois chiches, d’haricots et de lentilles et autres épiceries et denrées coloniales par des quantités réglées et à des heures fixes. La digestion de ces marchandises offrant de certaines difficultés, ils remplissent ainsi leurs journées d’une façon aussi inoffensive que peu coûteuse. »Et, plus loin, il donne cette note d’humour noire :
« La salle où l’on se tient les jours de pluie est comme une salle d’attente troisième classe dans quelque village stagnant, d’autant plus qu’il y en a d’honorables aliénés qui portent toujours un chapeau, des lunettes, une canne et une tenue de voyage, comme aux bains de mer à peu près, et qui y figurent les passagers. »
Mais, Vincent Van Gogh, malgré toute sa fermeté, malgré ses longs moments de lucidité parfaite, est assailli de cauchemars et d’hallucinations de la vue et de l’ouïe. Des prostrations complètes suivent, des mélancolies profondes, un dégoût de la vie. Pourtant il se reprend vite. Il s’analyse avec une complète lucidité ; il cherche d’où viennent ses crises, ce qui peut les déterminer. Comme il redoute ce qu’il appelle la « folie religieuse », il en arrive à se demander si la vue du cloître et des « bonnes sœurs » n’est pas la véritable cause de tout ? Ne serait-il pas mieux dans un asile laïque, par exemple ?... Et il se reproche d’avoir été lâché à Arles, de n’avoir pas défendu son atelier et sa personne contre tous ces gens qui se liguaient en face de lui. Mais, tout de suite, il en appelle à toute son énergie ; il travaille avec emportement. Il dit : « Je laboure comme un vrai possédé, j’ai une fureur sourde de travail plus que jamais. »
Et cela demeure un étonnement qu’il puisse, dans son état, peindre. Il le fait avec une hâte dévorante de beaucoup produire pendant qu’il en est temps encore ; car, il a beau se remonter, il croit que la folie approche, et qu’il ne sera bientôt qu’une chose misérable ainsi que les pires malades de l’asile.
En plein travail, son mal, en effet, la garrotte et il tremble d’effroi. Il se débat ; il tente d’échapper à ses hallucinations ; il s’enfuit, il court dans le parc ; il bute contre les arbres ; il hurle sa peur ; puis, soudainement, il retrouve le calme ; et il se remet à écrire et il se remet à peindre. C’est comme un homme nouveau qui raisonne avec toute sa rare intelligence et qui a chassé de lui-même une chose mauvaise. Il se croit reparti vers la guérison. Il est très vite en confiance ; il s’est persuadé qu’il ne sera sauvé que par son travail. Et, redevenu tranquille, il écrit vite à son frère que cette fois c’est fini, --- qu’il est bien improbable que les crises reparaissent.
Comme on lui a accordé la permission de sortir, il va deux ou trois fois, sous la conduite d’un gardien, à Arles ; et, à Saint-Rémy, il parcourt toute la campagne ; il s’épuise à peindre et à marcher. Il est attiré par les Alpines ; et il décrit toujours abondamment les tableaux qu’il a en train, avec la parure de cette lyrique et si descriptive poésie dont ses lettres se fleurissent.
Ces pathétiques lettres de Saint-Rémy, ces lettres qui témoignent de la plus merveilleuse énergie devant le mal, nous demandons quel homme de lettres eût pu les écrire plus cruellement, plus douloureusement --- et avec un plus notoire courage ? Oui, Vincent Van Gogh, dans sa lutte quotidienne, allait jusqu’à se crucifier de toutes ses épouvantes ; --- et certaines de ces épouvantes montent des enfers, --- hurlent comme des cris de sang dans des nuits de hideux cauchemars. Jamais, sans doute, il n’exista un homme plus brave ! Celui-là, quand il porte encore sur lui la sueur de ses terreurs, quand il garde encore son pauvre corps tout meurtri, s’il écrit à Théo, à sa belle-sœur, à sa mère, c’est pour les consoler tous, leur parler de son travail et des peintures qu’il estime, étant demeuré candide et toujours capable d’admiration.
Comment put-il traîner son martyre toute une longue année au milieu des déments ? Souvent, il s’entretenait des heures avec eux, « parce que, dit-il, il ne leur faisait pas peur » ; et il les plaignait quand il les voyait, dans la cours des agités, se lancer la tête en avant contre les murs. Le gardien n’intervenait pas toujours à temps ; et cela accablait Vincent.
Il fit de nombreux portraits à Saint-Paul: des portraits de malades et de surveillants. Le docteur Peyron n’ayant jamais voulu poser, il le plaça, cependant, dans son tableau qui représente l’Entrée du quartier des hommes.
Il peignit, dehors, beaucoup de paysages. Des vignes, des champs d’oliviers. Quand il restait dans sa chambre, il travaillait d’après des gravures de Delacroix et de Millet. Il tendait ses forces ; et, brusquement, la peur d’une nouvelle crise l’étouffait. Poussé à bout, sortant d’un long abattement, il écrivit un jour, malgré lui, à Théo:
« Durant bien des jours j’ai été absolument égaré comme à Arles, tout autant sinon pire, et il est à présumer que ces crises reviendront encore dans la suite, c’est abominable… »
Il eut l’autre courage de faire deux portraits de lui, « faute de modèle ». Et il dit, habitué maintenant à se considérer en face :
« L’un de ces portraits je l’ai commencé le premier jour que je me suis levé, j’étais maigre, pâle comme un diable. C’est bleu violet foncé et la tête blanchâtre avec des cheveux jaunes, donc un effet de couleur. »
En même temps qu’il écrivait à Théo, Vincent n’oubliait pas ses amis d’Arles, l’interne Rey, le pasteur Salles, Roulin et les Ginoux.
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Vincent VAN GOGH par Gustave COQUIOT (Librairie OLLENDORFF - 1923)
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