Jean-Baptiste Camille COROT - (1796-1875), il peint surtout des paysages, mais il est également l'auteur de nombreux portraits.
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Jean-Baptiste COROT - (1796 -1875).
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Tombe de Jean-Baptiste-Camille COROT au cimetière du Père Lachaise à Paris
Jean-Baptiste Camille COROT - (1796-1875), né le 17 juillet 1796 à Paris et mort à Ville-d'Avray le 22 février 1875.
Né en juillet 1796, Jean-Baptiste Corot entra d'abord, au sortir du lycée de Rouen, chez un marchand de drap, où il resta jusqu'en 1822. A cette époque, poussé par la vocation, il entra, malgré ses parents, dans l'atelier du peintre Michallon, puis il alla en Italie, où il étudia seul. Le Salon de 1827 vit exposer ses premiers tableaux : Vue prise à Narni et la Campagne de Rome. Depuis, ses toiles ont été très-nombreuses, mais le succès fut long à se déclarer en faveur de l'artiste. Sa Danse des Nymphes fut achetée par le musée du Luxembourg, et, en 1855, une Vue de Marcoussis, fut acquise par Napoléon III. Sa réputation ne date réellement que cette époque, bien qu'il ne vendît pas encore ses tableaux aux prix considérables qu'ils ont atteints depuis.
Jean-Baptiste Corot avait reçu une deuxième médaille en 1833, deux premières en 1848 et 1855, une deuxième à l'exposition universelle de 1867. Il avait été fait chevalier de la Légion d'honneur en 1846, et officier en 1867.
Jean-Baptiste Corot faisait le plus noble usage de la fortune qui était venue si tard lui sourire. Pendant le siége, il donnait plus de 50. 000 francs en secours. On se rappelle que, dernièrement, il constitua une rente de 1.000 fr à la veuve de son ami le peintre Millet, et le nombre des artistes malheureux qu'il a soulagés est considérable.
C'est un glorieux pinceau qui s'arrête, c'est un bon noble coeur qui cesse de battre. La peinture perd en Corot un de ses repésentants les plus illustres et les plus originaux; les malheureux perdent un bienfaiteur comme ils n'en retrouveront pas de longtemps.
Jules Dupré disait, il y à quelques jours :
- Peut-être un jour remplaceron-t-on le peintre; l'homme, jamais!
Tous ceux qui ont connu Jean-Baptiste Corot l'aimaient, et dans les ateliers le deuil est universel.
Deux grands paysages qu'il venait d'achever figureront au Salon de cette année. Ce sont une Danse antique et le Bûcheron.
Un de nos collaborateurs appréciera prochainement l'œuvre de Jean-Baptiste Corot et l'influence du maître sur ses contemporains; mais nous avons tenu dès aujourd'hui à nous associer à tous ceux qui déposeront leurs regrets sur la tombe de cet artiste si original, et de cet homme d'un si noble caractère.
V.-F.M
(Tableau de Jean Baptiste Camille COROT)
(Le Village de Presles, près de Beaumont-sur-Oise (vers 1850)
© photo: (www.van-gogh.fr)
Huile sur toile Beden (Suisse), Museum Langmatt. Stiftung Sidney und Jenny Brown.
Chef d'oeuvre mêlant absolue rigueur d'une composition savamment agencée et douce simplicité d'une atmosphère paisible, à peine troublée par la silhouette minuscule du paysan dans son champ, autour duquel s'organisent tous les autres motifs de la scène.
SON ATELIER
Après avoir gravi le quatrième étage du N°58 de la rue Paradis-Poissonnière, on arrive à l'atelier occupé depuis longtemps par le grand artiste que la France vient de perdre. Rien de plus simple que cette chambre (car on ne pourrait guère lui donner d'autre nom) où furent exécutés tant de chefs-d'œuvres; on y avait accès par un corridor assez étroit encombré de grandes toiles, dont quelques-unes étaient couronnées depuis ou dix ans et plus.
C'est au premier chevalet près de la porte de droite, que le maître s'asseyait le plus ordinairement, travaillant d'un oeil sûr et d'une main ferme, sans le moindre appui. Du reste, les quatre ou cinq chevalets éparpillés dans l'atelier sont tous garnis, la plupart même, de plusieurs étages de toiles; allant de l'un à l'autre, Corot travaillait tantôt ici, tantôt là, consacrant rarement plus d'une demi-heure à la fois à chacune d'elles. Dans les grandes circontances, on l'a vu passer deux à trois heure à la même œuvre, mais c'était une exception.
Vous ne trouverez pas auprès de lui cette petite table, sorte de servante, supportant les mille ustensiles indispensables aux peintres. Chaque fois qu'une couleur, un pinceau ou bâton de craie venait à lui manquer, l'artiste se levait, et allait le chercher à l'entrée de l'atelier à droite. Peu avare d'ailleurs de ses pas, dès que quelqu'un entrait, Corot, avec cette bonne grâce dont il avait le secret, se levait, venait au-devant du visiteur et l'accueillait par des paroles bienveillantes. « Eh bien! cher maître, disait l'un ; cher papa Corot, disait un autre, comme vous portez-vous? vous avez bien bonne mine! » Avec son limpide regard et son fin sourire. « Eh! eh! répondait-il, j'ai... un pied dans la tombe... » Hélas! en entendant cette réponse amicale, nous ne nous doutions guère, ni lui non plus --- que cette tombe dût sitôt s'ouvrir. --- Et il ajoutait : « Ce me sera bien difficile d'arriver au but, car j'ai encore vingt-cinq ans à aller pour voir mes trois siècles, étant né le 28 juillet 1796. » Après cette courte entrée en matière, la conversation s'engageait vive, alerte, animée, spirituelle, avec quelque nuance de malice gauloise, dont il était un vrai type, mais sans jamais y joindre la moindre méchanceté ni la plus petite médisance.
Que de visiteurs, et de combien de conditions, n'a-t-il pas vu défiler, ce modeste atelier! Depuis le grand seigneur et l'opulent banquier, jusqu'au timide artiste à peine débutant et encore inconnu, tous étaient reçus avec la même grâce affable et digne, avec la même bonhomie en quelque sorte légendaire. Une des plus singulières, assurément , de toutes ces visites, fut celle de cet amateur de province, venu chez Corot dans l'espoir de lui acheter quelque toile... Frappé, ébloui de la quantité d'études et de tableaux accrochés à chaque pan de mur, jetés de tous côtés sur les chevalets et à leur pied, il ne trouva point d'autre mot à dire que ceux-ci: « Mais c'est une usine, c'est une usine » et après l'avoir répété deux ou trois fois, il s'en fut sans pouvoir dire autre chose.
Faisant presque tout le tour de l'atelier et commençant à hauteur d'appui, des rayons supportent un nombre considérable d'études dont quelques-unes très anciennes, marquent les débuts même de l'artiste ; on en voit d'Italie, de toutes les contrées de France, de Hollande, de Suissse et même d'Angleterre. Là, sur le panneau à droite, c'est le tableau d'Agar, exposé en 1835, œuvre importante et dont les fonds surtout dénotent des qualités exceptionnelles d'air et de lumière. On rencontre aussi parfois d'autres œuvres que celles du maître : Ici en face de vous, ce tableau très-sombre dans son cadre noir et or, c'est une vieille peinture hollandaise ; à gauche, au-dessus des plâtres, c'est un effet d'hiver de Charles Desavary ; plus près de nous, sur le même panneau, ce sont des fleurs dessinées par M. Chabal Dusurger. Corot n'était pas exclusif : il accueillait avec intérêt toute œuvre exécutée avec conscience.
Près de ce même panneau de gauche, au fond et à côté des placards qui fond face au spectateur et qui referment de nombreux carnets de voyage remplis de notes et de croquis, ainsi qu'une partie des costumes réservés aux modèles, se trouve le bureau où Corot dépouillait sa correspondance et s'asseyait pour écrire. Tout près de là, sont ses portefeuilles bourrés de dessins, de gravures exécutés par lui; à l'opposite, d'autres portefeuilles renferment les œuvres de divers artistes.
Dans ce coin retiré et sombre, que nous appellerions volontiers la salle à manger, la bonne Adèle, qui le servait avec tant de dévouement depuis quarante ans, lui apportait tous les jours, à onze heures, la soupe, seul repas qu'il fît en attendant celui du soir. C'est dans les tiroirs de cette table que le maître déposait ses innombrables pipes pour l'intérieur, ses cigares pour le dehors, et puis et puis ses petits paquets d'or et d'argent; c'est là également qu'on le voyait se glisser discrètement par la porte du fond du corridor quand il était allé répondre à un quémandeur, après avoir satisfait à sa requête. Il revenait souvent alors une larme dans les yeux, puis, une seconde après, il se remettait gaiement au travail en chantonnant : « Le Seigneur exauce ma prière! vous allez voir passer sur ma toile les jolies branches et les petites fleurs! Ah! que c'est bon de pouvoir soulager un pauvre ami! C'est encore là, je vous assure, ce qu'il y a de plus beau dans l'art... Tenez, puisque vous avez vu ce qui s'est passé, vous allez maintenant être témoin que je vais récolter en une heure le double de ce que ce malheureux à reçu. » En effet, le vieux et charitable maître allumait pipette, et, la cheminée de l'usine aidant, la brosse écrasait cette grasse et solide couleur, puis, en un tour de main, la toile, vaillamment attaquée, se trouvait en quelque sorte transfigurée.
Que de fois nous avons assisté dans ce modeste atelier à des scènes de la même nature et toujours aussi touchantes! Nul ne l'ignore; notre illustre et bien aimé maître n'était pas seulement un grand artiste, c'était surtout un noble coeur et une belle âme; si l'art vient de faire une perte en quelque sorte irréparable, la nombreuse famille artistique perd également dans la personne de Jean-Baptiste COROT un appui toujours dévoué, et, pour certains de ses membres, un bienfaiteur toujours généreux et discret.
Alfred ROBAUT
Extrait de "LE MONDE ILLUSTRE" - Journal hebdomadaire - du N° 933 du 23 Février 1875.
© photo: (www.van-gogh.fr)
Jean-Baptiste COROT - (1796-1875) - Jean Baptiste Camille COROT
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